
C’est marrant ce Twitter. Comme nous, enfin surtout vous, il a bien changé depuis son arrivée dans l’arène des réseaux sociaux. Je me souviens… (les … c’est quand je ferme les yeux avec mon crayon dans la bouche pour me souvenir).
Lorsque Twitter est arrivé en France, j’ai créé mon compte. Direct. C’est comme ça je n’y peux rien, je suis attiré par la nouveauté, je ne peux pas résister. Je suis ce qu’on appelle dans la langue de Shakespeare 2.0, un early adopter. Par exemple quand Mamiche, best boulangerie in da world de la rue Condorcet du IXème, a lancé sa babka (une vraie merveille), je me suis précipité, et je n’en démord pas. Ce qui me vaut aujourd’hui d’avoir ce corps un peu rond dans les coins, mais… bon qu’est ce que j’y peux, c’est ça un vrai early adopter !
On dit souvent pour présenter twitter que c’est un peu comme un bar avec des mecs bourrés qui parlent de tout, et qui donnent leur avis tout en se criant dessus. Alors… je suis un peu un spécialiste de la question, des bars, et je pense que je peux tout à fait donner mon avis sur le sujet. Et personne ne pourra me taxer de… quoi déjà ? D’ultracrépidarisme à ce qu’il parait. Ce qui est bien avec la vie c’est qu’on apprend de nouvelles choses tous les jours. Je reformule cette phrase qui n’a pas de sens, désolé : ce qui est bien avec la vie c’est qu’on peut apprendre de nouvelles choses tous les jours. Voilà c’est mieux.
Si je suis spécialiste, un expert comme on dit aujourd’hui, c’est que j’ai largement dépassé les 10.000 heures de pratique de l’activité, et là je parle toujours de bars, et que je peux donc être qualifié de bartabacologue, Ph.D suma cum laude. Vous pouvez m’appeler Docteur Gaël, cela ne me gêne pas, merci.

Pour atteindre cette expertise, très tôt je pratiquais.
J’ai en effet passé une grande partie de ma prime jeunesse à regarder des hommes gober des ‘cahouètes tout en se mouillant le gosier à coup de bières de 17h à 18h30 et de verres de Ricard ® jusqu’à 20h puis c’était le retour au port avec les moyens du bord où les attendaient comme il se doit leurs féminines assistantes de vie, quand elles ne les avaient pas déjà quitté.
Les gens qui parlent, boivent, parlent… mais surtout boivent
Il est vrai qu’en cet endroit des gens parlaient, tout le temps, critiquaient, racontaient leur vie, se contredisaient, et pour finir s’engueulaient. Comme sur Twitter, il y en avait toujours un pour se lancer dans un monologue, un thread donc, et les autres l’écoutaient, certaines fois ils intervenaient pour lui poser des questions. Ça c’était s’il était chanceux. Car ici aussi il y avait beaucoup d’esseulés qui n’en finissaient pas de blablater. Et de dire ce qu’ils pensent de Mitterand, de l’aut’ con de Fabius, Platini qu’il est même pas Français quand on perd et surtout de l’autre là… l’Hidalgo, cette horreur, quand est-ce qu’on va s’en débarrasser, punaise (je traduis là) mais hein, ça suffit quoi !
Bon là vous vous dites « non mais Châtellier, il yoyotte maintenant, qu’est ce que vient faire Hidalgo, notre future présidente, dans cette peinture à la truelle d’un estaminet du début des années 80 ? ». Eh bien non, je n’ai pas grillé l’un de mes vaisseaux (marrante cette image, je pense là tout de suite à Nelson, l’amiral pas le commentateur) et je suis toujours là avec vous parce ce que c’est de Michel Hidalgo dont je parle ici, l’entraineur de foot qui comme tout entraîneur est un incompétent jusqu’à ce qu’il se réincarne en Aimé Jacquet.
Une présence féminine qui fait entendre sa voix
La grande différence entre Twitter et le bar tabac de mon enfance, et je dirais presque la seule, c’est qu’il y a des filles sur Twitter. Au comptoir qui m’abreuvait (lait fraise ou diabolo menthe, c’étaient mes cocktails, j’avais 10 ans !), pas l’ombre d’une présence féminine. La connerie était 100% masculine alors qu’aujourd’hui les tweets permettent aussi à la moitié de l’humanité (bon pas vraiment en fait ce n’est que 35% en 2020), qui jusque là n’avait pas le droit à la parole, d’étaler elle aussi son incompétence et sa mauvaise foi si tant est qu’on lance un débat sur la 5G, Karim Benzema, les vaccins, les masques, les abeilles… et tout ce qui fait débat dans le monde qui tire à sa fin qu’on m’avait dit qu’elle serait rigolote mais j’ai un peu l’impression qu’on nous a menti un peu quand même.
Au bar de mon enfance, je regardais mon père, dit Le Padcha (son pseudo sur le zinc, je vous laisse imaginer le bonhomme, mi Gabin mi Staline, une merveille) qui, en juge de paix des conversations, clôturait très souvent les échauffements verbaux d’un regard qui te faisait comprendre à la perfection cette phrase d’Audiard Père : « Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, les types de 60 kilos les écoutent. ». Alors Mimines, parce qu’il avait de grosses mains, Manu, qui s’appelait Roger mais pour nous c’était Manu et l’Eponge, parce que…ben vous voyez bien quoi !, vidaient leurs verres et quittaient les lieux en se disant que demain serait l’occasion de remettre une nouvelle tournée, et que cette fois-ci ils allaient lui montrer au Padcha c’est qui qui a raison.

Sur le Twitter de l’aube du crépuscule de mes jeunes années, il est pas là Le Padcha pour mettre fin aux disputes. C’est peut-être ce qui manque le plus à ce troquet en ligne si vous voulez mon avis.
Ah… vous ne le vouliez pas, mon avis ?