Le cercle des hydroalcooliques anonymes – Confiné, Jour 4

Les lendemains se compliquent

Cher Journal,

J’ai depuis ma plus tendre enfance une relation assez sympa avec l’alcool, une Lambada rigolarde arrosée à la cachaça. Je n’ai aucun mérite, c’est mon héritage de franc gaulois qui s’exprime. Moitié pilier de comptoir, quart de tonneau houblonné avant le pastis qui rend les soirées Drucker moins tristes, je suis la caricature du bon français label Bleu Origine Contrôlé surgit des caves de la fin du XXème siècle. C’est dire si j’étais préparé à ce que nous vivons.

Le début de l’arrivée du commencement des prémices de l’épidémie qui allait devenir une pandémie amena avec lui une nouvelle habitude qui consiste à se laver intensivement les mains. Tout le monde, mais je dis bien tout le monde, s’est pris pour Meredith Grey. Lavage de main, 20 secondes, toutes les heures. A la lotion hydroalcoolique ! Et vas-y que je me barbouille (j’adore ce mot) les mimines (idem) à chaque occasion. Du medic-porn dans dans tous les coins de France, Jackie et Michel catégorie «  blouse blanche », c’était tout pareil.

Et puis… Edouard Philippe, il a parlé.
Restez chez vous. 

Quel coïtus interuptus d’une violence incroyablement… euh… violente. Fini les manuels plaisirs hydroalcooliques. Tout le monde chez soi. Plus besoin de l’arrosage rituel de l’hydroalcool  (l’hydromel c’était ça ?), les anciens ont inventé le savon. Fini le plaisir luxueux d’un flacon labellisé LVMH pour se dépatouiller du mal, nom de code Covid-19. Déception, cloître, isolement, tristesse.

A chaque problème, une solution qui contient souvent de la convivialité dedans.

Le Grand Confinement, c’est ainsi qu’on l’appellera, marque l’arrivée d’une nouvelle cérémonie qui a le bon goût des soirées d’autrefois. Les Watsappéro, Skypero, et autre ZoomParties… qui vont peut-être avoir ma peau. 
Amoureux de la vie de groupe, j’ai été scout je vous le rappelle, Edouard n’avait pas fini de prononcer le mot confinement (qui est un mot assez marrant si on le démonte au pied de biche) que j’avais déjà lancé l’idée super d’un rendez-vous « apéro virtuel ». Les autres, ceux qui font de la vie un Enfer donc, se sont jetés dessus.

Depuis, tous les soirs autour de l’heure du chien, du loup ou de la chèvre de Jacques Séguin, je ne sais plus l’expression, on noie les souvenirs des lavages de mains à la bière, au pastis, au vin… On rit beaucoup, parce qu’on doit rire pour détendre les muscles du visage et avoir une belle peau. Important d’avoir une belle peau.

De temps en temps, j’en vois une qui s’absente. Avec elle, je sais que c’est plus difficile que pour les autres, son regard ne trompe pas, je l’ai déjà vu chez d’autres avant. Je suis gentil parrain animateur.
On le sait bien dans le groupe pourquoi elle s’éloigne… elle va s’hydroalcooliser en cachette, je ne la juge pas, ce n’est pas sa faute.

Salaud de Bernard Arnault ! Putain de complot des lobbystes hydroalcooliers !!!

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